../s3_ae.gif 21 mai 1940. Combat final de la casemate du Tréchon (forêt_de_Mormal). Dossier réalisé à partir du récit de Falesse_Charles, illustré avec des photos d'une maquette signée Gricourt_Kevin. Cima_E_R ©2021.

Combats du soldat Falesse_Charles.
(Deuxième partie)
21 mai 1940. Reddition de la casemate du Tréchon.

Avant-propos

Avant-propos

Il y a maintenant plusieurs années, Delaporte_Jacquy nous faisait parvenir les souvenirs de Falesse_Charles en mai 1940, dans « sa » casemate du Tréchon_ (SF_Maubeuge).

Le dossier que nous en avions alors réalisé et publié nous a valu le plaisir (en 2021) de recevoir des photos signées Gricourt_Kevin, photos d'une maquette que ce dernier a réalisée pour illustrer Tréchon, le 21 mai 1940, jour de son combat final.

Nous vous proposons donc ici un dossier sur le jour de la reddition de la casemate du Tréchon ; texte de Falesse_Charles (via Delaporte_Jacquy) et photos de la maquette de Gricourt_Kevin.

Un clic ICI permet de visualiser sur la carte que, dès le 18 mai au soir, les Allemands ont presque encerclé les casemates de la forêt_de_Mormal, ce qui leur permettrait de les attaquer par l'arrière ! C'est ce qu'ils feront le 21 mai !


Maquette

Maquette de la casemate du Tréchon

Maquette des dessus de la casemate.

Les trois « plaques de tôle » que l'on voit sur la dalle de la casemate correspondent aux restes d'une protection d'un FM qui avait été installé là en guise de DCA, dans l'après-midi du 17 mai 1940.

En haut de la photo on peut voir les deux cloches GFM_A. Elles sont armées, chacune, d'un mortier de 50mm et d'un FM.

► En mai 1940, Falesse_Charles est dans la cloche de droite.

La casemate est à double flanquement, c'est à dire que son armement principal tire à partir de la gauche (vers le Nord-Ouest) et à partir de la droite (vers le Sud-Est) de la casemate.
Cet armement principal est sous béton avec, pour chaque flanquement, un créneau pour JM/AC47 et un créneau pour JM.



Maquette du flanquement de gauche.

Chaque flanquement a une protection passive et une protection active.

Protection passive : un fossé diamant empêche l'ennemi de s'approcher de trop près des créneaux.

Protection active rapprochée : un créneau pour FM défend le fossé et peut tirer vers l'arrière de la casemate.
Le créneau pour FM de protection rapprochée est visible à gauche, sur la deuxième photo.


Maquette du flanquement de droite, et de l'arrière de la casemate.

Mêmes caractéristiques que le flanquement de gauche : un créneau JM/AC47, un créneau JM, et (extrême droite de la photo, sous la visière que constitue la dalle) un créneau pour FM.

À l'arrière de la casemate (côté gauche de la photo) on devine la porte, avec sa passerelle enjambant le fossé diamant, et son créneau pour FM de protection de l'entrée.

Maintenant que le cadre est posé, nous allons passer au récit historique de Falesse_Charles, récit repérable par cette typographie utilisée.

20 mai 1940

20 mai 1940

Le jour se lève (...) L’activité sur la route reprend [civils fuyant la Belgique], nos tirs au mortier et au canon antichar aussi mais, prenant conscience que nos projectiles pouvaient tuer des civils, nous cessons le feu.

Nous continuons de vivre dans l’incertitude et n’avons aucune notion de la situation.

Aussi curieux que cela puisse paraître, l'équipage de la casemate n'a en effet aucune information sur la situation militaire de son environnement car... les casemates de la forêt_de_Mormal n'ont été équipées ni de téléphone ni de radio !


21 mai 1940. Le combat final

21 mai 1940. Le combat final.
Début de l'attaque.

Début de l'attaque

Le lendemain 21 mai, je dois céder mon mortier à la cloche voisine, le sien a le percuteur endommagé.

Pour toute défense, il ne me reste qu’un FM pour tirer vers l’avant, les deux autres créneaux sont obturés par des épiscopes amovibles, afin observer tous azimuts.

Le jour est déjà levé quand je vois, à l’aide du périscope télescopique, dans le champ de fil de fer barbelé à l’arrière de notre bloc, une paire de cisaille « à l’ouvrage » ; cet outil est évidemment manœuvré par deux bras qui encadrent un casque très caractéristique qui ne trompe pas.

Alerte ! C’est le commencement du combat final. L’ennemi installe son matériel de combat aux positions les plus avantageuses pour nous éliminer.

Nous ouvrons le feu, l’adversaire répond aussitôt, la bataille s’engage, de plus en plus violente.

Les projectiles ennemis percutent les parties les plus sensibles de la casemate : les créneaux, les orifices de ventilation et les appareils d’observation. Le feu crache de partout.

Je m’assure un objectif vers l’avant, les douilles dégringolent dans la goulotte. Douvrin_, le tireur du FM du bas de la cloche, doit aussi, lorsque je tire, tourner la manivelle du ventilateur manuel.
Il doit et tirer et se retourner pour aider à chasser les gaz des douilles que percute mon arme...

En effet, au bas des cloches GFM, les douilles percutées tombent dans un récipient étanche et leurs gaz toxiques sont éliminés non par un ventilateur électrique, mais par un ventilateur actionné à la main (système dont la photo a été prise par Terver_Olivier dans l'abri CORF du Bichel_Sud).


...Par contre, lui n’a pas de goulotte d’évacuation des douilles tirées, elles tombent sur le sol et nous respirons les gaz brûlés.

L’atmosphère devient irrespirable et je vois des Allemands qui installent une mitrailleuse MG_34 près de la baraque-cuisine. C’est pour moi !

Maquette avec, au voisinage de la porte d'entrée de la casemate, la baraque-cuisine contre laquelle deux Allemands sont en position de tir.
Sur cette photo on voit bien le créneau pour FM de protection de l'entrée.


Autre vue de la baraque-cuisine.


La première rafale crépite sur l’acier, la peinture intérieure tombe en poussière ! C’est alors que je regrette de n’avoir plus de mortier. Je ne peux rien faire ! L’ennemi continue son tir et met mon périscope hors d’état.

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Impact des balles sur la GFM occupée par Falesse_.
Photo Gricourt_Kevin.


Devenu observateur aveugle, je descends aux ordres et dois mettre mon masque, c’est le brouillard. Mon collègue de l'autre cloche est dans le même cas. Le chef nous sert un quart d’alcool et nous retournons à nos postes plutôt précaires.


L'assaut.

L'assaut

Les pionniers ennemis se sont infiltrés sur notre casemate et ont pendu une de nos tôles de DCA avec des fils de fer, dans l’axe des mitrailleuses.

Maquette avec créneau de JM obstrué par l'une des tôles déposées le 17 mai sur la dalle de la casemate.


Tout à coup, une détonation violente nous secoue tous, un obus de rupture a frappé et traversé la porte, balayant le couloir.

Maquette avec, face à la porte d'entrée de la casemate, un canon que les Allemands viennent de mettre en place.


J’entends crier, le chef est grièvement blessé ainsi que le lieutenant, les Allemands continuent de tirer, le Caporal-Chef Perin_ est tué net.


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Impact de l'un des obus de rupture à l'intérieur de la casemate.
Photo Gricourt_Kevin.


La situation est grave, le brouillard est encore plus épais. Le combat se calme. Un camarade avance vers le couloir mais ne revient pas.

J’avance à mon tour dans l’opacité du brouillard pour distinguer brusquement une silhouette avec un masque différent du nôtre, le casque aussi est différent. Deux révolvers sont braqués sur moi et l’un d’eux m’invite à me diriger vers la porte. Je ne peux qu’obéir, la porte est ouverte, la passerelle tordue, je sors les bras levés, ébloui par le soleil.

A ma gauche, un soldat allemand braque sur moi un pistolet-mitrailleur. J’avance de quelques mètres, jusqu’à un groupe d’Allemands en demi-cercle, appuyés sur leur arme. J’enlève mon casque.

Maquette, porte de la casemate.


Un Allemand s’avance et délicatement s’approprie mes jumelles, un autre prend mon béret de forteresse prisonnier dans mon ceinturon et décroche l’insigne « on ne passe pas », qu’il glisse dans la poche de sa tunique en riant ; puis, comme pris de scrupule, il sort une boite de cigarettes, m’en tend une et me l’allume, après m’avoir rendu mon béret que je coiffe.

Tous les autres camarades sont alors éjectés de la casemate.

Les Allemands s’affairent. L’un des leurs avec un brassard de la Croix-Rouge est penché sur le lieutenant allongé sur une civière ; le sergent-chef souffre énormément. Un conducteur de side-car fait le plein avec notre carburant. Avec un copain, je suis chargé de sortir Perin_ pour le mettre en terre.


Maquette illustrant l'évacuation de la casemate. Le side-car allemand est au premier plan de la photo.


Je demande des nouvelles des opérations militaires à un de nos gardiens. Il se fait un plaisir de m’informer que la veille au soir, vers 20 heures, des hommes du bataillon d’infanterie portée du Lieutenant-Colonel Spitta_ de la 2ème Panzer_Division, continuant au-delà d’Abbeville_, ont atteint la mer aux environs de Noyelles_.

La mer ? La mer ? Je communique l’information aux camarades qui, comme moi, sentent leurs derniers espoirs s’envoler.

Clics pour visualiser la position des Allemands :

-au soir du 18 mai 1940

-au soir du 21 mai 1940.


Départ en captivité.

Départ en captivité

Après nous avoir distribué des biscuits de guerre du lot qu’ils viennent de récupérer dans la casemate, les Allemands nous rassemblent en deux groupes, l’un porte le lieutenant sur une civière, l’autre le sergent-chef à l’aide de la capote du soldat Manet_ qui va regretter amèrement de ne pouvoir en profiter tout au long du périple qui l’attend.

Encadrée de soldats, l’arme à la bretelle, la colonne s’ébranle et quitte le lieu du combat. Le chef demande à boire mais un gardien m’explique que ce sera fait au poste de secours. Je lui demande l’heure, il tire une grosse montre de son gousset et me dit « onze heures et demie » ; devant mon air surpris, il me rappelle que l’heure de Berlin_ est en avance d’une heure sur celle de Paris_.

Nous arrivons au carrefour du Cheval_Blanc où nos blessés sont conduits dans une maison. Un homme nu-tête, vêtu d’une blouse blanche et chaussé de hautes bottes noires, sans doute le médecin militaire Allemand, nous indique l’endroit où déposer nos armes et nous congédie aussitôt.

Nous rejoignons nos camarades d’infortune quand un soldat arrive pistolet au poing et demande deux hommes pour la corvée d’eau ; j’en suis, nous allons à la pompe remplir une bassine d’eau qui va servir à désaltérer les prisonniers qui en ont bien besoin.

La colonne se reforme et nous quittons ce coin de la forêt_de_Mormal pour arriver à Englefontaine_ et faire une halte.

Ordre est donné de nous aligner le long d’un grand mur, à l’entrée d’un carrefour à gauche. C’est à cet endroit que nous passons notre première nuit de captivité. Nous sommes las, harassés, meurtris, moralement anéantis. Couché sur le sol, le long de ce mur, la nuit tombée, je ressasse les évènements de cette terrible journée qui vient de s’achever.

Sans arrêt passent devant nous les éléments non motorisés des divisions d’infanterie allemande. Courant presque avec les chevaux, défilent les canons, caissons, véhicules de combat, voitures transportant munitions, matériel, approvisionnement de toutes sortes.

Des fantassins avancent parallèlement à ce bruyant défilé. Parfois des balles traçantes marquent le ciel et il m’arrive d’entendre les détonations des tirs de DCA. Certains camarades, malgré le vacarme, brisés de fatigue, le ventre creux, dorment déjà. D’autres, accablés, restent silencieux.


Fin du récit de Falesse_Charles, donnant un goût amer à ce début de la « bataille_de_France ».
On ne peut que remercier vivement Delaporte_Jacquy de nous l'avoir fait parvenir avec autorisation de le publier, ainsi que Gricourt_Kevin de nous avoir permis d'illustrer ce dossier avec des photos de sa maquette de la casemate du Tréchon !


Remarques

En guise de conclusion, remarque sur ces combattants

À part les scènes violentes inhérentes à toute guerre, dans ce récit on ne peut sans doute qu'admirer le courage et la résignation de tous les combattants.
Les membres d'équipage de cette casemate ont été mis là avec ordre de tenir et, sans se poser de questions autres que celles inhérentes à leur mission, ils ont tenu jusqu'au bout !
Côté Allemands, ils viennent de réussir avec succès la prise de leur objectif et traitent les vaincus sans morgue ni arrogance, voire avec égards.


Avez-vous lu la première partie des « combats du soldat Falesse_Charles » en 1940, casemate du Tréchon ?
Accès par ICI !


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Compléments...

Compléments...
Commentaires d'Internautes

Commentaires d'Internautes

Super dossier !
G. B.


Merci.
D&I W.


Bravo.
André B.


Toujours très intéressant M Cima
Sylvie et Bob.



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E-R Cima, kaff.