../s3_ae.gif Le 10 mai 1940 en Luxembourg.
Document réalisé à partir d'éléments d'origines diverses : SHD Vincennes - JMO de la 1eBS, archives de la 3eDLC et de la 3e armée - archives diplomatiques (Quai d'Orsay) - Précisions d'Albert Schaack
(E et R Cima ©2005-2020)

10 mai 1940 en Luxembourg.
Le signe avant-coureur d'une cuisante défaite.

Introduction

Introduction

Pourquoi focaliser sur le Luxembourg au 10 mai 1940 ?

Comme nous allons le constater au fil de ce dossier, le Grand-Duché du Luxembourg est très intéressant à plus d'un titre car, si la « bataille de France » ne s'y est pas directement jouée, de nombreux indices, causes de la future défaite française, s'accumulent ce 10 mai 1940 sur ce territoire neutre.

Ce champ d'affrontement est certes modeste, mais lorsque vous aurez lu ce dossier... sans doute, comme nous, verrez-vous d'un autre œil la « bataille de France » qui débute ce jour-là.


Rappels succincts

Rappels succincts
Plan «Dyle»

Le plan français « Dyle-Breda » prévu et exécuté le 10 mai 1940

Convictions alliées

Entre la France et l'Allemagne, la frontière française est protégée par la ligne Maginot. (Sur la carte nous n'avons représenté en rouge que les parties de la ligne Maginot avec artillerie d'ouvrages.

Tout au long de la « drôle_de_guerre » (1939 - 10 mai 1940), le général Gamelin, généralissime des forces armées françaises, ainsi que les gouvernements alliés (France / Grande-Bretagne) en sont convaincus : en premier lieu, les Allemands dissuadés d'attaquer de front cette ligne Maginot, porteront leurs efforts au-delà de cette dernière, au Nord de la France, dans les trois pays neutres que sont les Pays-Bas, la Belgique et le Grand-Duché du Luxembourg.

Ensuite, avec leurs armées très motorisées, les Allemands pourront alors attaquer la France par sa frontière du Nord, peu fortifiée, sauf si...

...sauf si, dès les premiers mouvements allemands dans les pays neutres déjà cités, la France contre-attaque et prend ses ennemis en tenaille !


Plan « Dyle-Breda »

Et c'est ainsi que le général Gamelin, approuvé par les chefs des gouvernements français et anglais, retient donc la contre-attaque suivante (plan Dyle-Breda) : dès les premières incursions allemandes en pays neutres, les troupes alliées feront mouvement et prendront en tenaille l'ensemble du dispositif ennemi.

Hypothèses de Gamelin relatives à l'attaque allemande.
Flèches jaunes : attaque allemande ;
● Zone verte : forêt des Ardennes supposée difficilement praticable par une armée de blindés.

Plan Dyle-Breda prévu en contre.
Flèches violettes : contre-attaque alliée,
-par mouvement vers les Pays-Bas, au travers de la Belgique ;
-en Belgique ;
-au Sud Luxembourg.


Plan côté Luxembourg

Plan français prévu côté Luxembourg

Sur cette carte du Grand-Duché du Luxembourg, nous avons repéré en rouge les ouvrages de la ligne Maginot avec artillerie et, en bleu, la ville de Luxembourg.


Complément au plan « Dyle-Breda », en ce qui concerne le Luxembourg

L'hypothèse retenue par le général Gamelin est que les Allemands traverseront ce pays d'Est en Ouest (flèches jaunes sur notre carte ci-dessous), bien au Nord de la ville de Luxembourg (en bleu).

En effet, des troupes passant parallèlement à la ligne Maginot, au Sud de cette ville, verraient leur flanc marchant gauche très vulnérable aux coups d'unités françaises toutes proches de leurs bases de stationnement.

Dans ce plan français, c'est la 3e_DLC (général Petiet), unité de la 3e_armée (général Condé), qui a en charge la protection de la frontière franco-luxembourgeoise.
En cas d'attaque allemande du Luxembourg, la 3e_DLC doit pénétrer dans le Sud de ce pays (flèches violettes ci-dessous) jusqu'au niveau de sa capitale, et plus haut si possible, afin d'effectuer des destructions retardatrices.

Hypothèse de Gamelin relative à l'attaque allemande.
Flèches jaunes : attaque allemande.

Plan français prévu en réaction.
Flèches violettes : 4 zones de contre-attaque, par la 3e_DLC, à partir de la frontière franco-luxembourgeoise.


Ce plan de contre-attaque est-il réaliste ?

Militairement parlant il l'est, sauf à tenir compte du fait que la France s'autorise ainsi de pénétrer elle aussi en territoire neutre. Mais c'est alors un problème plus diplomatique que militaire car le Luxembourg ne possède pas d'armée.

Le seul « petit problème » réside dans le fait que le Luxembourg a fermé ses frontières, tant avec l'Allemagne qu'avec la France, au moyen entre autres de chicanes bétonnées. Il est donc nécessaire d'avoir prévu de faire sauter ces dernières si l'on veut traverser la frontière avec des engins motorisés de quelque importance. Les Français ont, bien évidemment, intégré ce problème technique à leur plan de marche.

Constat, au 10 mai 1940

Malgré le plan français, nous allons constater que, le 10 mai 1940, le Luxembourg sera traversé en totalité par les Allemands, en seulement quelques heures !


Nous allons donc chercher les raisons de cette fulgurante percée que les Français avaient imaginé pouvoir juguler ou, pour le moins, pouvoir freiner.
Et, tout au long de ce dossier, nous garderons en tête une phrase de Napoléon Bonaparte :

« Le grand art, c'est de changer pendant la bataille.
Malheur au général qui arrive au combat avec un système. »

Précisons un sous-entendu important, de cette phrase de Napoléon : pour changer de tactique pendant la bataille encore faut-il savoir épier, analyser et interpréter les moindres mouvements adverses ! Comme nous allons le constater, ce ne fut pas tout à fait le cas, côté français, le 10 mai 1940, en Luxembourg !


Réactivité française peu évidente

Français informés

Nuit du 10 mai 1940.
Voies diplomatiques françaises

Les français sont informés avant le début de l'attaque allemande

Les archives du Quai d'Orsay (ministère français des affaires étrangères) ont conservé peu de documents relatifs à ce 10 mai 1940, mais ceux que nous avons consultés sont significatifs et ne peuvent que nous interpeller.

Ci-dessous, vous trouverez l'intégralité des télégrammes diplomatiques successifs reçus au Quai d'Orsay (tout au moins ceux que nous avons pu consulter dans les archives), en provenance du Luxembourg et de la Belgique et reçus juste avant l'attaque allemande.

Ils donnent une idée claire sur le traitement français des informations relatives au Luxembourg, cette nuit du 10 mai 1940.

0h30. Télégramme n°151 du Ministre de France au Luxembourg à Ministère [français] des Affaires Étrangères : «Des informations venant d'un milieu allemand indiquent que quelques-uns au moins des allemands du Grand-Duché sont convoqués pour cette nuit avec des armes. Il y a ce soir des mouvements assez remarqués (d'artillerie notamment) le long de la frontière allemande. Le bruit court ici que l'armée allemande est entrée en Hollande./.»

1h30. Télégramme n°23 du Quai d'Orsay (M. SEYDOU) au Cabinet [français] de la Guerre : «J’ai l’honneur de vous faire savoir que notre Ministre à Luxembourg m’a fait tenir, à minuit trente, la communication suivante : [contenu du message n°151]»

Un temps de latence d'une heure, entre le Quai d'Orsay et le Cabinet de la Guerre, peut difficilement se concevoir surtout si l'on a prévu de contre-attaquer en forçant la frontière du Luxembourg.

1h50. Le Ministère des Affaires Étrangères (Quai d’Orsay) téléphone au Ministre de France au Luxembourg, pour plus amples informations. Ce dernier répond que les mouvements suspects constatés à la frontière germano-luxembourgeoise semblent avoir tendance à se calmer, depuis minuit.


2h25. Télégramme n°619 de l’Ambassadeur de France en Belgique (M. BARGETON) à Ministère [français] des Affaires Étrangères : «Le Ministre des affaires étrangères [de Belgique] me communique à l’instant que, d’après les renseignements recueillis par l’état-major hollandais sur le secteur Overyssel-Aix la Chapelle et par l’état-major belge depuis Aix la Chapelle jusqu’au Luxembourg, une grande activité régnerait depuis ce soir 21h parmi les troupes allemandes à la frontière. Sans exclure entièrement la possibilité de manœuvres, le gouvernement belge estime que la situation requiert une extrême vigilance./.»

2h30. Télégramme n°620 de l’Ambassadeur de France en Belgique (M. BARGETON) à Ministère [français] des Affaires Étrangères : «Organisation nazie du Grand-Duché de Luxembourg aurait été alertée pour cette nuit et reçu des munitions./.»

2h35. Télégramme n°621 de l’Ambassadeur de France en Belgique (M. BARGETON) à Ministère [français] des Affaires Étrangères : «Le Ministre des Affaires Étrangères [de Belgique] apprend de Berlin que la source qui avait annoncé l’attaque sur le Danemark informe que les ordres sont donnés pour attaque générale à l’Ouest le 10 mai à l’aube./.»

3h00. Télégramme n°24 du Quai d'Orsay (po CHARVERIAT) au Cabinet [français] de la Guerre : «Suite à précédent message n°23, à 1h50 notre Ministre à Luxembourg, interrogé par téléphone, signale que les mouvements suspects constatés dans la soirée le long de la frontière germano-luxembourgeoise semblent, depuis minuit, avoir tendance à se calmer, au moins momentanément.»

Ce dernier télégramme est pour le moins curieux. En effet, il est envoyé au Cabinet de la Guerre à 3h00 et fait référence à des faits signalés à 1h50, faits qu'il minimise alors même que l'Ambassadeur de France en Belgique vient d'être peu optimiste, plusieurs fois de suite (à 2h25, 2h30 et 2h35) !


3h40. Télégramme n°152 du Ministre de France au Luxembourg à Ministère [français] des Affaires Étrangères : «Des incidents sanglants sont survenus, à ce qu’on m’assure, en 4 points différents aux barrières récemment posées le long de la frontière allemande. 2 gendarmes ont été grièvement blessés. Les agresseurs paraissent être des «touristes». On ne signale encore aucune violation de la frontière par les troupes venant d’Allemagne. Les communications téléphoniques sont interrompues entre Luxembourg et les villes luxembourgeoises le long de la frontière allemande. Le Ministre des Affaires Étrangères m’indique que la Grande Duchesse s’est rendue près de la frontière française. Cette dernière information a un caractère strictement confidentiel./.»

La Grande Duchesse est informée par radio

Même si les incidents de frontière sont éventuellement à relativiser, le seul fait que la Grande Duchesse prenne la précaution de sortir de nuit de son palais pour se diriger vers la France est significatif d'une « alerte » non négligeable.

En effet, la Grande Duchesse dispose de son propre service de renseignement radio. Depuis quelques mois, des postes radio sur batteries (pour éviter les coupures de transmissions liées à d'éventuels sabotages des lignes électriques), ont été installés dans la plupart des gendarmeries luxembourgeoises des régions frontalières. Ces postes émettent à destination d'un central relié à la résidence de la Grande Duchesse. Ils sont, bien évidemment aussi, captés par les Français et les Allemands... s'ils veulent bien s'y intéresser.


Réaction française

Réaction française difficile à mettre en oeuvre rapidement en Luxembourg

Nos archives de référence :
1e_BS (Brigade de Spahis) commandée par le colonel Jouffrault aux ordres de la 3e_DLC (général Petiet), unité de la 3e_armée française (général Condé).

À 4h du matin, après le déclenchement d'une violente attaque aérienne allemande sur de nombreux terrains d'aviation au voisinage des frontières entre la France, la Belgique et le Luxembourg, les Français semblent prendre conscience du sérieux de l'attaque.
Le terrain de Sénon_Spincourt, où sont basés les avions d'observation de la 3e_armée française, est bien sûr lui aussi visé.

4h30. PC de la 3e_armée française [à l'attention des unités sous ses ordres, dont la 3e_DLC]. «Renseignements en provenance du Luxembourg indiquant une menace d'invasion allemande dans le Grand-Duché.»

Inquiétudes immédiates à la 3e_DLC

L'inquiétude vient du fait que, dans l'état actuel des choses, la 3e_DLC ne pourra matériellement pas assurer pleinement sa mission lorsqu'on lui donnera officiellement l'ordre de passer en Luxembourg !

Elle en rappellera les raisons deux jours plus tard (dans son rapport du 12 mai), lorsque le 3e bureau de la 3e_DLC notera que l'alerte lui est bien parvenue à 4h45 mais que « Les détachements du Génie chargés des destructions [entre autres des chicanes bétonnées que les Luxembourgeois avaient érigées sur leurs frontières] avaient été remis au travail et leurs camionnettes rendues aux Corps qui les avaient prêtées. »
En d'autres termes le Génie n'était plus opérationnel sur zone !

Et ce n'est pas tout !

Dans ce même rapport du 12 mai 1940, le 3e bureau de la 3e_DLC notera aussi que : « Les permissions avaient repris au taux de 15%. Enfin le GRRF 45 [Groupe de Reconnaissance de Région Fortifiée] (...) avait été maintenu dans ses cantonnements de Thionville. Il lui fallait 4 heures environ pour gagner ses emplacements de départ. (...) Dans un tel dispositif, les délais dans lesquels la Division était susceptible de franchir la frontière était de l'ordre de 3 heures, pour la plupart des éléments, mais de 4 heures au minimum pour le GRRF 45 et même davantage pour la 541e Cie de Sapeurs... »

Cependant, en attendant de trouver des solutions pour pallier aux problèmes rencontrés, à 5h10, le PC de la 3e_DLC adresse un message d'alerte générale à ses éléments désignés pour entrer en Luxembourg, dont la 1e_BS (Brigade de Spahis) : « Préparez-vous à exécuter la mission prévue. »

Les Allemands informent de leur passage à l'action

Au même moment (5h15) le représentant allemand en Belgique fait officiellement part, au gouvernement belge, de la décision allemande « d’assurer la neutralité des Pays-Bas de la Belgique et du Luxembourg » (de les protéger, en quelque sorte) en pénétrant sur leurs territoires respectifs.

Et à 5h35, les troupes allemandes passent en force les frontières des Pays-Bas, de la Belgique et du Luxembourg.

De son côté, pendant près d'une heure trente, la 3e_DLC se réorganise alors pour gérer les absences de certains personnels.

Notons que le général Petiet, qui commande cette Division, vient tout juste de rentrer de permission (nom des congés pour les militaires) tel qu'il l'indique dans ses « souvenirs personnels » publiés le 15 septembre 1943 dans la Revue des Deux Mondes : « Je terminais le 9 au soir, à Paris, une courte permission. Lorsque j'avais, quelques jours plus tôt, quitté mon PC d'Aumetz, sur la frontière luxembourgeoise, on semblait « dans les hautes sphères », après les alertes d'avril, revenu à une quiétude complète. [...] J'arrivais à mon PC d'Aumetz le 10 mai, bien après 1 heure du matin. »

Il faut donc un certain temps, concevable, pour que le général soit mis au courant de la situation actuelle, telle qu'elle est (mal, comme nous le verrons) connue de son état-major. Et c'est donc à 6h40 que le général Petiet demande à son supérieur (le général de la 3ème armée), l'autorisation de s'emparer des barrières qui interdisent les itinéraires d'entrée en Luxembourg.

À 6h45 le PC de la 3e_armée donne l'ordre d'entrer en Luxembourg.
Mais cet ordre ne sera exécuté que bien plus tard.

7h05. Le général Petiet, sans attendre que son dispositif ne soit au complet (entre autres toujours par manque de personnel du Génie), donne cependant ordre à toutes ses unités proches de la frontière de se porter en Luxembourg comme elles le peuvent. Cet ordre téléphonique arrive entre 7h05 et 7h50 selon les unités concernées.

Deux jours plus tard, toujours dans son rapport du 12 mai 1940, le 3e Bureau de la 3e_DLC fait état du fait que « La colonne centre de la 13e_BLM [Brigade Légère Motorisée], Lt-colonel Le Couteux de Caumont, était prête [?] à 7 heures 30 » et que « la 1e_BS [Brigade de Spahis] y entrait à 8h15 ».


Remarquons que les forces françaises franchissent la frontière luxembourgeoise environ 2h30 après les forces allemandes et que, d'Est en Ouest, le Luxembourg fait moins de 50km. On peut alors douter de la mise en œuvre efficace, par l'armée française, des destructions prévues de routes et de voies ferrées devant les Allemands en marche !


Les lignes L1, L2 et L3 ?

D'après les mémoires du colonel Jouffrault (commandant la 1e_BS), l'ordre téléphonique de franchir la frontière est « confirmé par l'ordre général (paru sous le n°451/3) suivant : Exécutez intégralement mission prévue Luxembourg Belgique. En cas d'impossibilité d'atteindre tous les objectifs, se rétablir sur L1 en vue d'exécuter sans nouveaux ordres les destructions. Signé Petiet. »

Pour se faire une idée de ce qu'est la ligne L1, il importe de se replonger dans l'hypothèses Gamelin de l'attaque allemande supposée, telle que nous l'avons notée précédemment.

Les blindés Allemands entreraient directement en Belgique, sans passer par le Grand-Duché du Luxembourg. Le flanc gauche de ces blindés en marche serait protégé par de l'infanterie traversant le Nord Luxembourg (flèches jaunes sur la carte). La riposte française (flèches violettes) consisterait alors à monter au-delà de la ville de Luxembourg (point bleu) et à effectuer des destructions de routes et de voies ferrées afin de bloquer les convois d'infanterie allemande.

S'il y avait ensuite combats, les unités françaises engagées devraient s'établir sur la ligne L1 (trait noir au niveau de la ville de Luxembourg), puis décrocher éventuellement sur la ligne L2 (à mi-chemin entre L1 et la frontière franco-luxembourgeoise) et, en dernier ressort, se rétablir sur la ligne L3 qui est quasiment au niveau de la frontière.

Le 12 mai, dans son rapport déjà cité plus haut, le 3e Bureau de la 3e_DLC précise, à propos de l'ordre transmis par téléphone le 10 mai entre 7h05 et 7h50 : « le Général sentant profondément la nécessité d'agir vite décidait de ne pas attendre que le dispositif soit complétement en place et lançait l'ordre de coupler les découvertes aériennes et terrestres, de porter les Groupements en avant jusqu'à la ligne n°2. »

Dans ce rapport, une notion, entre autres, semble poser question, celle que sous-tend le mot « découvertes ». La 3e_DLC aurait-elle attendu si longtemps avant de chercher à savoir ce qui se passait en territoire luxembourgeois dans lequel elle devait pénétrer ?


Mauvaise surprise pour les français, et polémique sur les causes de cette « surprise » !

Ce 10 mai 1940, les unités françaises entrant en Luxembourg constatent une grande différence entre les suppositions/certitudes de leurs états-majors et la réalité. En effet, la 1e_BS par exemple, qui vient de traverser la frontière en toute tranquillité, fait une amère découverte.

Extrait du JMO de la 1e_BS : « Presque aussitôt après le débouché, les Spahis se heurtent à de nombreuses résistances de groupes francs et de civils armés. Elle progresse néanmoins rapidement en forçant ou tournant les résistances. »

D'après leurs JMO respectifs, toutes les unités de la 3e_DLC entrées en Luxembourg sont persuadées de voir un peu partout des civils armés qui leur tirent dessus (ce qui fera polémique encore des dizaines d'années plus tard), alors qu'en réalité il s'agissait de commandos et d'unités de la 34e_DI allemande, que les Français ne s'attendaient pas à trouver sur leur chemin et qui avaient pris position près de la frontière française !

Au sujet de la polémique à propos des civils ou non civils luxembourgeois étant intervenus à l'arrivée des troupes françaises, le journaliste Henri Koch_Kent a écrit un excellent livre publié en mai 1971 : « 10 mai 1940 en Luxembourg ». Les témoignages et documents officiels qu'il y présente montrent que les français entrés en Luxembourg, étaient mal (et même pas du tout) renseignés sur les mouvements de troupes allemandes dans le Grand-Duché.

Polémique ou pas, on constate que les services du renseignement français semblent avoir été défaillants, soit au niveau de leurs recherches d'informations, soit au niveau de leurs transmissions des renseignements recueillis, car des unités de la 3e_DLC ont bien reçu ordre de se porter en avant sans avoir une connaissance des conditions du terrain dans lequel elles allaient mettre les pieds !

Nous reviendrons plus loin sur cette 34e_DI allemande. Pourquoi était-elle là ? Comment y était-elle arrivée sans éveiller les soupçons des Français ?... Mais avant, intéressons-nous à d'autres mouvements allemands en Luxembourg, au cours de cette matinée du 10 mai 1940.


Les Allemands n'ont pas exécuté le plan prévu par Gamelin !

Les mouvements allemands en Luxembourg

Les mouvements allemands en Luxembourg

Le « Fall Gelb »

Le « Fall Gelb » (Plan Jaune) est le nom de code allemand de l'ensemble du dispositif mis en oeuvre pour attaquer la France. Ce plan, élaboré dès 1939, a subi de nombreux remaniements jusqu'à sa mise en application, le 10 mai 1940.

Vu rapidement sur une carte, le « Fall Gelb » ressemble à s'y méprendre aux hypothèses retenues par le général Gamelin : les attaques flèches jaunes sont essentiellement centrées sur les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg : un groupe d'armées B est dirigé vers les pays-Bas et la Belgique, et un groupe A est dirigé vers la Belgique et le Luxembourg.

Le groupe C, quant à lui, protège indirectement le flanc gauche du groupe A en faisant semblant de vouloir attaquer la ligne Maginot. Il dissuade ainsi les français de dégarnir une partie de leur dispositif mobile local rattaché à leurs fortifications.

La différence de stratégie entre la réalité allemande et ce qu'avait imaginé le général Gamelin est essentielle et tient dans les rôles respectifs des groupes d'armées A et B.

Gamelin était persuadé que le groupe B constituerait le gros de la puissance blindée allemande et qu'il fallait donc focaliser sur lui.

Malheureusement, pour les armées franco-britanniques, le fer de lance du dispositif allemand, au 10 mai 1940, est le groupe d'armées A dont les blindés du XIXe corps (commandé par le général Heinz_Guderian), passent par le centre Luxembourg !


Quel objectif premier pour les blindés de Guderian ?

Les blindés du XIXe corps (Guderian) sont répartis en trois « Panzerdivisionen » : la 1e_PZD, la 2e_PZD et la 10e_PZD.

Leur premier objectif est d'entrer en France au niveau de Sedan, via la zone au relief sinueux et tourmenté des Ardennes luxembourgeoises puis belges !

Sedan est un point faible dans le dispositif français de défense : un point vulnérable situé au-delà de la ligne Maginot à l'artillerie puissante (en rouges sur la carte), un point où la fortification disparate est sans grande valeur défensive et, enfin, un point où, d'après les services secrets Allemands, les troupes d'Hitler ne sont pas attendues en masse. De plus, Sedan n'est, à vol d'oiseau, qu'à 100km de la frontière entre l'Allemagne et le Luxembourg.

À 5h35 du matin, ce mercredi 10 mai 1940, les trois divisions blindées de Guderian passent donc en même temps la frontière entre l'Allemagne et le Luxembourg.
● la 1e Panzerdivision (général Kirchner) près de Wallendorf,
● la 2e Panzerdivision (général Veiel) près de Vianden,
● la 10e Panzerdivision (général Schaal) près d'Echternach.

Puis elles traversent le Luxembourg (flèches jaunes sur la carte) très rapidement, blindés en files indiennes, avec deux itinéraires différents pour la 10e_PZD.


La traversée est si rapide que les premiers éléments de la 1e_PZD franchissent la frontière de la Belgique, à Martelange, à 7h45, alors qu'à la frontière franco-luxembourgeoise, l'armée française est encore en train de préparer son entrée en Luxembourg !

On peut se demander comment une telle quantité de blindés a pu circuler sans être repérée par les services du renseignement français. Les observations aériennes étaient, certes, quasiment impossibles à effectuer à cause de la puissance de la chasse Allemande, mais n'y avait-il pas des observateurs patentés ou occasionnels sur ce territoire, territoire que le général Gamelin avait identifié comme étant un lieu de passage de troupes ennemies ?

Comme nous l'avons dit en début de dossier, « pour changer de tactique pendant la bataille encore faut-il savoir épier, analyser et interpréter les moindres mouvements adverses ! » et l'on constate, ici encore, une lacune française dans ce domaine du renseignement.

Photo du général Guderian entouré d'officiers dans la ville belge de Bouillon, le 12 mai 1940, la veille de son attaque sur Sedan, ville située à 15km de là.
Photo Bundesarchiv. © Clic.Photographe : o.Ang.
Titre : Belgien, Bouillon.- General Heinz Guderian mit Offizieren.
Reproduction et diffusion interdites sans accord de la Bundesarchiv.


La 34e_DI allemande

Revenons-en, maintenant, au Sud Luxembourg où toutes les unités de la 3e_DLC (de la 3e armée française) ayant franchi la frontière, ce 10 mai 1940 au matin, ont été accueillies par des tirs d'armes automatiques provenant de la 34e_DI allemande alors que ces unités françaises ne s'attendaient pas à trouver des ennemis si près d'elles.

Nous venons de voir que, dans le « Fall Gelb », les Allemands ont prévu de faire passer par le Nord Luxembourg une partie de leurs blindés, fer de lance de leur attaque sur la France.

Du même coup, ils ont aussi prévu, pour protéger ces blindés pendant leurs déplacements d'Est en Ouest, d'intercaler des divisions d'infanterie entre eux et la frontière franco-luxembourgeoise. L'une de ces divisions d'infanterie est la 34e_DI, commandée par le général Hans_Behlendorff. La mission de ce général est d'intervenir au Sud de la ville de Luxembourg contre un éventuel débouché de troupes françaises.

Pour les Allemands, il est très risqué de faire avancer une division d'infanterie si près de la frontière française aussi, sur ordre d'Hitler, le parcours de cette division est-il jalonné par de petits commandos déposés par avions !

À propos du transport de ces commandos, nous allons laisser à M. Albert Schaack le soin d'en parler, lui qui nous a fait le plaisir de nous adresser des informations sur ce sujet.


Le « Luftlandekommando Hedderich »

Le « Luftlandekommando Hedderich » (par M. Albert_Schaack)

Charte graphique pour les textes de ce chapitre :
Typographie utilisée pour repérer les informations fournies par M. Schaack.

L'opération allemande

Il s’agissait d’une opération aéroportée effectuée au moyen de petits avions du type FIESELER Fi 156.

Photo de mai 1940. Un Fieseler Storch Fi 156 au cours de la bataille_de_France.
Photo Bundesarchiv. © Clic.Photographe : Boesig, Heinz.
Titre : France, Campagne ouest. Avion Fieseler Storch Fi 156 dans un champ, soldats; PK 689.
Reproduction et diffusion interdites sans accord de la Bundesarchiv.


Photo de 1940 prise en Pologne. Normalement, l'avion ne peut transporter que le pilote et deux passagers avec tout leur armement. Ici il semble y avoir le pilote, 3 passagers et sans doute un mécanicien restant au sol.
Photo Bundesarchiv. © Clic.Photographe : Wisniewski.
Titre : Pologne. Soldats devant l’avion Fieseler Fi 156 "Storch" (Identification: NL-ZA).
Reproduction et diffusion interdites sans accord de la Bundesarchiv.


C’est un petit avion de liaison et de reconnaissance capable d’atterrir et de décoller sur tout terrain sur une distance de 25 à 50 mètres !
Il pouvait emporter 3 hommes [dont son pilote] avec armes et bagages.
À cause de son train d’atterrissage surélevé, il portait le surnom de « Storch » (en français « cigogne »).

L'opération portait le nom de « Luftlandekommando Hedderich » et le commando était composé de 125 hommes divisés en cinq groupes. Ils partaient d’un petit aérodrome près de Trèves en Allemagne situé entre 50 et 60 km en vol d’oiseau de leur lieu d’intervention et les Fieseler devaient faire plusieurs allers et retours pour emporter les 125 hommes.

Les soldats de cette opération, issus de la 34e division du Général Behlendorf, avaient subi pendant des semaines une instruction spéciale et cela en grand secret.

Un commando à 5 groupes

Le nom de son commandant est le Oberleutnant Werner Hedderich. 125 hommes, tous volontaires de la 34e division, répartis en 5 groupes pour cinq objectifs au Sud Luxembourg.

Mission : barrer la route à l'avant-garde française débouchant de la ligne Maginot.

D'Est en Ouest les lieux du débarquement exact étaient désignés de la façon suivante :

● 1. lieu-dit « Hau » à 5 km au Nord du village frontalier de Frisange,
● 2. au Sud-Ouest de Bettembourg au point 306 nommé «Mechelacker»,
● 3. au croisement vers « Foetz », entre Pontpierre et Esch-sur-Alzette, au point 282,
● 4. au croisement dit « Aessens » près de Soleuvre, point 329,
● 5. au croisement Pétange-Bascharage–Niedercorn au lieu-dit « Biff ».

La flotte d'avion Fi 156 ne comprenait que 25 avions. Des allers-retours étaient donc nécessaires.
Chaque avion emportait avec son pilote 2 soldats avec armes et munitions (mitrailleuses, mines, grenades ou une arme antichar portable).
La composition au départ des divers commandos n’est pas connue ni le nombre total d’hommes effectivement débarqués.

Au lieu 2, un Fieseler avait capoté et trois autres au lieu 3 à cause du terrain marécageux. Il n’y eut que des blessés légers. Deux Fi s’étaient égarés sur les hauteurs de Kayl.

Au soir du 10 mai, les pertes en hommes avaient été relativement importantes aux points 1 et 3. Il n’existe pas de chiffres exacts.

Hedderich avait débarqué au point 4.

Sur cette carte nous avons repéré (cercles jaunes) les 5 lieux (essentiellement des carrefours de routes) où les hommes du commando Hedderich se sont embusqués après débarquement aux points 1, 2, 3, 4 et 5 donnés par M. Schaack.

Nous avons représenté (flèche jaune) le déplacement de la 34e_DI qui était précédée, bien sûr, par son avant-garde.

Nous en avons profité pour représenter, aussi, le mouvement de la 76e_DI car nous allons évoquer cette division allemande au chapitre suivant.

Le cercle bleu indique, ici encore, la position de la ville de Luxembourg.

Selon une source internet, 22 avions avaient été perdus. Cependant l'opération était considérée comme étant un succès puisqu'aucune unité d’avant-garde française n’avait su neutraliser ces points d’arrêt et atteindre ses objectifs.

Documents de référence de M. Schaack, pour cet épisode de guerre

● 1. «Kriegsschauplatz Luxemburg… Mai 1940» de ET Melchers, édition 1991 p. 380-387 et 407-422.

● 2. Un article paru le 10.05.2000 dans le quotidien «Jounal» signé L. Nilles au titre « Luftlandekommando Hedderich ». À l’invitation du journaliste Henri Koch-Kent, le Colonel e.r. Werner Hedderich avait visité son ancien lieu de combat à Soleuvre et en avait profité pour fournir quelques détails de sa mission.

● 3. Il existe sur internet deux forums allemands qui traitent entre autres de ce sujet.


Nous pouvons constater, une fois de plus, que parmi tous ces mouvements des troupes allemandes, même effectués le plus discrètement possible, certains auraient pu être observés par des Français ! C'était d'ailleurs la crainte du général Hans_Behlendorff, commandant de la 34e_DI, qui redoutait de se trouver nez-à-nez avec des blindés français ainsi qu'à subir des mitraillages aériens. Il n'en fut rien !

À propos d'aérien, nous allons terminer ce dossier par un chapitre réservé aux « découvertes » aériennes françaises, en Luxembourg, ce 10 mai 1940.


Découvertes aériennes

Découvertes aériennes françaises

En préambule de ce chapitre, rappelons que ce 10 mai 1940, entre 7h05 et 7h50, par téléphone le général Petiet, commandant la 3e_DLC « sentant profondément la nécessité d'agir vite [ ! ] décidait de ne pas attendre que le dispositif soit complètement en place et lançait l'ordre de coupler les découvertes aériennes et terrestres... »

Nous avons alors vu, et entrevu, les conséquences du manque de découvertes terrestres précoces lancées en Luxembourg. Et la question que l'on peut alors se poser concerne les « découvertes aériennes » lancées en même temps que les terrestres : qu'ont-elles donné ?

Découvertes aériennes avec Potez 63

La photo ci-contre, de ce Potez 63-11 R3, a été prise par mon père (Gaston Cima) en 1940. Il était au groupe de chasse I/6 et, donc, hors de la zone Luxembourg.

Précisions de notre ami Jean-Jacques Moulins, sur la signification de R3 (Potez 63-11 R3).

« En 1939-40 les avions de combat français étaient désignés par une lettre et un chiffre, rappelant leur spécialité et le nombre de membres d'équipage. On avait ainsi :
● les chasseurs, qui affichaient la lettre C. Comme ils étaient le plus souvent monoplace, c'étaient des C1. La seule exception était, à ma connaissance, le Potez 631 qui était triplace. C'était donc un C3. Mais, utilisé surtout pour la chasse de nuit, il était alors appelé CN3,
● les bombardiers, qui étaient surtout des B4, comme le Léo 451,
● les avions de reconnaissance, qui étaient des R3 (comme le Potez 63-11 figurant sur la photo de ton papa), ou Le Bloch 175. »


Nous avons consulté des documents du service historique de l'armée de l'air (SHD à Vincennes) relatifs à la Base aérienne de Sénon_Spincourt, où le 10 mai 1940 sont stationnés les avions d'observation travaillant pour le compte de la 3e_DLC. Ce document indique : « le 10 mai, au petit jour, l'aviation ennemie attaque le terrain de Sénon (...) Trois missions (Potez 63) ont lieu en Luxembourg au profit de la 3ème DLC qui se bat avec acharnement et non sans succès à la frontière depuis le matin (...) »

8h. Le Potez 63 n°365 décolle de la base aérienne de Sénon-Spincourt. L'équipage est composé du capitaine Ronut (observateur) du sergent Neuville (pilote) et de l'adjudant Rossignol (mitrailleur).

Sa mission consiste à reconnaître le terrain sur tout le Sud Luxembourg à une altitude moyenne de 1300m. Une brume au sol limite la visibilité mais ne l'empêche pas de constater que si le Sud-Ouest du Luxembourg est sans activité remarquable il n'en va pas de même à la frontière germano-luxembourgeoise. En effet en liaison phonique avec le PC de la 3e_DLC le Potez signale des activités anormales aux points suivants (petits ronds bleus sur la carte) :

* 8h40. Région Remich-Palzem-Wehr : plusieurs passerelles sur la Moselle. « Activité autour de ces passerelles que des troupes franchissent, il semble sans interruption. Sommes tirés par la DCA à la verticale de Palzem »

* 8h50. « Activité routière sur route Remich-Mondorf et Bous-Mondorf. Environ 150 à 200 voitures genre BDP [Bataillon de Dragons Portés]. Tête de colonne à Ellange et Wellenstein en direction de Mondorf. »

* 8h55. « Message lesté au PC de la Division [3eDLC à Aumetz] pour signaler l'activité précédente. »

Fin de la mission. À 9h15 le Potez se pose sur son terrain. L'impression générale de son observateur est que « l'activité qui se remarque autour des passerelles signalées ne semble pas se déverser sur notre frontière. En dehors des routes allant vers Mondorf il n'y a aucune activité routière du Nord vers le Sud. »

Lorsqu'on sait que les Allemands agissaient déjà un peu partout dans le Sud luxembourgeois, on peut être étonné par l'optimisme affiché au cours de cette reconnaissance aérienne dont, d'après les archives, les auteurs sont loin d'avoir été félicités, plus tard, par leur hiérarchie.

Remarque sur la 76e_DI. Ce Potez vient d'observer non pas les mouvements de la 34e_DI mais ceux de la 76e_DI (général Maximilian de Angelis) entrée à l'extrême Sud-Est du Luxembourg avec, pour mission, d'y rester tout en effectuant quelques petites incursions en territoire français (à Sierck, Kontz...), très près de la frontière, afin de contrôler les points de passage d'éventuelles contre-attaques, et en faisant, aussi... diversion.
Mission semble-t-il pleinement remplie, si l'on se réfère au rapport de reconnaissance aérienne du Potez sur zone entre 8h40 et 8h50 !


Les 2 autres observations aériennes seront effectuées entre 9h30 et 11h par le Potez 63 n°389 et entre 18h45 et 19h37 de nouveau par le Potez 63 n°365. Elles ne trouvent rien de très spécial à signaler à part quelques rassemblements épars dans tout le Sud Luxembourg !

Voici ce qu'en dit le général Petiet, dans ses souvenirs publiés dans la Revue des Deux Mondes le 1er octobre 1943 : « Fait curieux, les reconnaissances aériennes de l'après-midi n'ont pas décelé d'objectifs importants. Tout au plus, une reconnaissance effectuée entre 18 heures et 18 heures 30, signalera-t-elle quelques rassemblements ennemis, notamment dans les bois d'Athus, à Petange et dans les bois voisinant Sanem.
Soit que les troupes allemandes, dans les rares moments où elles étaient survolées par nos avions, soient parvenues à réaliser un camouflage des plus efficaces, soit que le rôle de l'avion d'observation sur le champ de bataille moderne soit devenu particulièrement ingrat, j'ai dû constater, par moi-même, à différentes reprises, au cours de la campagne, combien il eut été imprudent d'asseoir son opinion sur tout renseignement négatif ou quantitatif de l'aviation... »

On pourra relever qu'avec sa phrase « (...) les troupes allemandes, dans les rares moments où elles étaient survolées par nos avions (...) », le général Petiet semble avouer implicitement une faiblesse dans la quantité d'observations aériennes mises en oeuvre ! Cependant, juste après, il préfère plutôt pointer du doigt le manque de fiabilité qu'il accorde personnellement aux observations aériennes.


Conclusions

Conclusions

Résultats de la journée du 10 mai 1940 en Luxembourg

En 24 heures, des divisions d'infanterie allemandes, tardivement et mal repérées, ont traversé le Sud Luxembourg d'Est en Ouest. Les français engagés contre elles étaient alors contraints de regagner leur territoire national, à part la 1e_BS dont la combativité lui permit de ne repasser la frontière que le 11 mai au soir, emmenant avec elle des prisonniers Allemands de la 34e_DI.

Le résultat le plus lourd de conséquences, pour l'issue de la « bataille_de_France » qui venait de commencer, fut la traversée du Luxembourg par le « fer de lance » constitué par les blindés du général Guderian. Trois jours plus tard, ce « fer de lance » dont la présence avait encore moins été détectée que celle des fantassins de la 43e_DI allemande, percait les lignes françaises à Sedan !

À méditer ?

À chaque chapitre de ce dossier nous avons pu constater que, ce 10 mai 1940 en Luxembourg, les états-majors françaises agissaient, par rapport aux Allemands, suivant un plan préétabli semblant immuable, comme par principe, et dans lequel donc se renseigner sur l'état de l'adversaire passait plus qu'au second plan.

Une telle rigidité dans la certitude d'avoir raison n'était-elle pas le signe avant-coureur d'une défaite française annoncée ? Aussi, nous terminerons ce dossier en répétant une nouvelle fois la phrase de Napoléon Bonaparte :

« Le grand art, c'est de changer pendant la bataille.
Malheur au général qui arrive au combat avec un système.
»


.

Commentaires

Commentaires
Commentaires

Commentaires

Merci ! Viele Grüße. Inge W.
Bonjour,
Comme toujours, superbe dossier bien documenté, bravo.
Cordialement,
C. G.
Je viens de finir de lire votre publication. C'est fort intéressant et j'ai bien apprécié les petites flèches et dessins significatifs... les images me parlent plus que les longues phrases...
Concernant cette gabegie et cette incapacité à prendre des décisions, à réagir, à coordonner de façon simple et compréhensible... ça me parait le reflet assez proche de ce que nous vivons actuellement [covid-19]... ordres et contre-ordres, idées et contre-idées.. voire pas d'idées du tout... etc etc.
Damned. On n'est pas sortis de l'auberge comme disait ma grand mère...
SLL.
COMPLIMENTS POUR VOTRE GRAND TRAVAIL ET MERCI POUT VOTRE AVIS TRES APPRECIES DE MA PART. J'ESPERE IL SERA APPRECIE EN FRANCE AUSSI.
J'ATTENDS VOS NOUVELLES.
F.R.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
E-R Cima, kaff.