5 mai 2024
« Groupe de niveau Attal », « Groupe de besoin Belloubet ». Et après ?
Dans les années 1980, le collège unique existait depuis peu et il se posait déjà la question des élèves en grande difficulté. Un établissement parisien avait alors créé une classe de 6ème spéciale pour une dizaine de jeunes au QI à développer. Une sorte de « groupe de niveau Attal » avant l’heure !< br />Mon mari enseigna dans cette classe l’année où elle fut créée. Selon lui, le mot « pédagogie » y prenait tout son sens étymologique. Mais le qualitatif des cours dispensés l’emportait grandement sur leur quantitatif à tel point qu’en fin d’année les programmes officiels n’avaient été abordés que dans leurs très grandes lignes, dans la plupart des matières.
Après ce test sur les groupes, l’année suivante le collège redevint « unique » (et « inclusif »). Le groupe de niveau de 6ème ne fut pas réitéré et les 10 jeunes de ce feu groupe se retrouvèrent dispersés dans les classes de 5ème. Dans leur groupe ils avaient progressé, certes, mais à leur rythme et pas au point de pouvoir suivre efficacement les cours qui leur étaient maintenant dispensés en 5ème et dans lesquels ils étaient littéralement « noyés ».
Quel gâchis pour eux ! Et un gâchis prévisible par tout pédagogue digne de ce nom ! Soit on crée des groupes de niveau qui se poursuivent d’année en année, des sortes de classes parallèles, mais alors on n’est plus dans le collège « unique » initié par Giscard d’Estaing (en 1975), soit on cherche une autre solution.
On pourrait alors être tentés par les « groupes de besoin Belloubet », ceux qui vont sans doute, et malheureusement, finir par s’appliquer à la rentrée scolaire 2024 ; des groupes fluctuants au cours de l’année ; de petits groupes dans lesquels des élèves vont passer quelques semaines afin de se familiariser avec une notion de maths ou de français qu’ils ont eu du mal à assimiler les années précédentes. Puis ces élèves vont réintégrer leur classe d’origine et participer aux contrôles communs.
Mais, pendant que les élèves du « groupe de besoin » tenteront de combler leurs lacunes en maths ou en français, les autres auront, eux aussi, des cours de maths et de français ; soit des cours sur de nouvelles notions, soit des cours de perfectionnement. Dans les deux cas, l’écart entre les premiers élèves et les seconds persistera donc et restera bien visible dans les résultats des contrôles communs ! Sauf à faire des contrôles de bas niveau qui n’inciteront plus bon nombre d’élèves à s’investir pleinement !
Les « groupes de besoin », outre qu’ils seront des usines à gaz côté gestion administrative des classes, seront donc aussi des systèmes perdants pour les élèves de tous niveaux. C’est déjà le cas avec le collège unique affaiblissant ceux qui pourraient être bon. On en voit d’ailleurs les effets navrants avec les tests PISA !
Alors ? Alors, comme je l’ai déjà dit, il faut adapter l’enseignement à chaque élève, car chacun a sa singularité, avec ses envies et ses besoins particuliers d’études. Et ce qui n’était matériellement pas possible il y a encore quelques années est en train de le devenir avec l’utilisation de l’IAG (Intelligence Artificielle Générative). Donc il n’est pas indispensable, en ce moment, de tenter de mettre en place un cache-misère passager au collège unique. Il faut investir intellectuellement dans l’école IAG de demain, un demain très proche ; trop proche pour ne pas effrayer bon nombre de nos politiciens !