../s3_ae.gif Ventilation des fortifications CORF. Blocs de combat.
Dossier réalisé par E_et_R_Cima à partir de documents techniques divers. E_R_Cima ©1999-2020

Ouvrages CORF.
Ventilation d'un bloc de combat.

Introduction

Introduction

Spécificité d'un bloc de combat

Si, pour la vie du personnel, les besoins généraux de ventilation sont les mêmes, dans le casernement souterrain et les blocs de combat, (évacuer l'air pollué et permettre de respirer normalement), un paramètre important l'emporte cependant au voisinage des armes ; au cours de leurs tirs ces dernières produisent une grande quantité de gaz toxiques, particulièrement concentrés dans les canons et dans les étuis vides des munitions consommées.

L'air du poste de tir peut très vite devenir délétère.

Le schéma définitif de ventilation d'un bloc de combat sera affiné tout au long de ce document, en liaison avec les paramètres analysés.


Isolation

Isolation du bloc

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Schéma (ou plutôt ébauche de schéma) de la ventilation d'un bloc de combat.


Protection du casernement

La première précaution à prendre consiste à séparer bloc et casernement par un sas étanche.
Ce dispositif empêche toute pollution du casernement par les gaz toxiques susceptibles de provenir du bloc en action.

Ouvrage du Bambesch (SF Faulquemont). Bloc 2.
Sas entre le bloc 2 et le casernement.
Photo Gérald Goeltl.


Utilisation de l'air pur du casernement

En dehors des périodes d'alerte et de tirs, le sas reste généralement ouvert et le bloc « profite » de l'air pur du casernement. Mais la bonne circulation de cet air nécessite la présence d'un circuit local d'activation de la ventilation.

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Ouvrage de Sainte Agnès (SFAM). B2.
La prise d'air pur est faite côté casernement, en avant du sas d'entrée dans le bloc.
Photo Cima.

Remarques. Ici, comme l'air pur passe ensuite en sous-sol, le manchon de prise d'air est vertical.
La petite gaine de ventilation que l'on voit au niveau de la voûte de la galerie est indépendante du système de ventilation que l'on est en train d'étudier.


Ouvrage de Sainte Agnès (SFAM). B2.
De l'autre côté du sas (côté bloc 2), un ventilateur puissant propulse l'air pur dans le bloc.
Photo Cima.

Remarque. Ici, l'air arrive côté droit de la photo (s'il n'est pas bloqué par une vanne), puis passe dans le ventilateur qui le propulsé dans la gaine, côté gauche de la photo.


Aide à la ventilation du casernement. Exemple concret.

Le 4 septembre 1939, juste après la déclaration de guerre de la France à l'Allemagne, le Hackenberg (SF Boulay) a complété son équipage (effectif : 33 officiers, 131 sous-officiers, 846 hommes de troupes ; commandant : Commandant Ebrard) et commence à fonctionner dans les conditions normales prévues par le Génie.

Se posent alors plusieurs problèmes dont celui du renouvellement régulier de l'air dans le casernement souterrain où respirent près de mille hommes.

Le 4 septembre 1939, au cours de la réunion « commission d'ouvrage », le Commandant Ebrard dicte alors l'ordre suivant :

hacken_doc.jpg

Point XII. Service intérieur... Les chefs de blocs ventileront tous en même temps de 6h à 8h, sas fermés, toutes les ouvertures de blocs ouvertes et en régime « normal » [celui que l'on vient de voir] pour remonter l’air des galeries.

Photo d'un document de Michel_Truttmann.

Comme on le constate, ce dispositif de ventilation des blocs peut être utilisé pour renouveler rapidement tout l'air du casernement !


Surpression

Mise en surpression du bloc de combat

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Schéma (ou plutôt : encore ébauche de schéma) de la ventilation d'un bloc de combat.

Au prix d'un surcoût de construction, on peut, à la fois, éviter la pénétration des éventuels gaz de combat ennemis, se protéger contre une attaque par lance-flammes et grenades, et éliminer les gaz toxiques produits au cours des tirs. Il suffit de rendre étanches les ouvertures vers l'extérieur (tout particulièrement les créneaux de tir) et de mettre le bloc en légère surpression !

Même si les ouvertures ne sont pas totalement hermétiques, l'air intérieur renouvelé s'oppose alors à toute entrée intempestive de gaz. De plus, à chaque ouverture de culasses, l'air du bloc s'engouffre dans la lumière du canon et chasse les résidus toxiques produits par la munition tirée.


La surpression prévue est officiellement de « 3mm d'eau » (+/- Clic : définition)Le « mm d'eau » (mmH2O), vieille unité, est défini comme étant la pression exercée par une colonne de 1mm de hauteur d'eau à 4°C dans les conditions standard de gravité terrestre. 1 mmH2O = 9,80638 Pa
Le Pa (Pascal) est l'unité légale de pression. Pour s'en faire une petite idée « simple », au niveau de la mer, et à 4°C, la pression atmosphérique est d'environ 101300 Pa.
dans les blocs d'infanterie et de « 7mm d'eau » dans les blocs d'artillerie.

Des manomètres permettent de contrôler cette surpression et des panneaux le rappellent (voir ci-dessous dans une casemate pour JM).


surpression_bc.png

Affichage sur le panneau ci-contre : « Attention. Jumelage de mitrailleuses. Lorsque la surpression intérieure du local descend au-dessous de 1mm d'eau : prendre les mesures de sécurité contre les gaz toxiques dégagés par les pièces (oxyde de carbone) ».

Des surpressions de 3 à 7mm d'eau n'incommodent pas le personnel. En revanche, des surpressions trop faibles risquent de ne pas être suffisantes pour se débarrasser du dangereux monoxyde de carbone !


Rotules d'étanchéité au niveau des créneaux de tir

Musée du Fermont (SF Crusnes).
À l'extrémité de ce trumelage (2 mitrailleuses et un canon de 25mm), on peut voir la rotule permettant le pointage de l'arme tout en conservant étanche son créneau.
Photo Gérald_Goeltl.


Salle de neutralisation

Salle de neutralisation

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Schéma (ébauche, encore ébauche) de la ventilation d'un bloc de combat.

Le surcoût de construction, pour mettre en surpression le bloc de combat, n'est pas limité au prix des créneaux étanches. En effet, lorsque les armes tirent, surtout lorsqu'il s'agit de matériel d'artillerie, les besoins en air pur sont si importants que l'utilisation de l'air du casernement est loin d'être conseillée.

En effet, pomper de l'air dans le casernement, c'est mettre ce dernier en dépression et favoriser ainsi sa pollution par des éventuels gaz de combat ennemis.

En matière de ventilation il importe donc que le bloc soit autonome lors de ses tirs et possède donc sa propre salle de ventilation. Et qui dit ventilation reliée à l'extérieur dit aussi neutralisation (par filtres) des gaz pompés.


sa_b2_sn.jpg

Ouvrage de Sainte-Agnès (SFAM). B2.
Salle de neutralisation de bloc.
Photo Cima.

Le B2 étant fortement armé (un JM, deux 75/31, deux 135, deux 81), sa salle de neutralisation est imposante.

On la voit ici aux couleurs normalisées d'origine.
► Vert : gaines pour air provenant de l'extérieur et donc éventuellement pollué.
► Rouge : gaine pour air respirable, dépollué si besoin après passage dans les filtres.
► Blanc : gaine reliant directement le circuit vert au circuit rouge. Cette gaine évite de passer par les filtres, pour le cas ou l'air extérieur serait respirable.


Prise de l'air extérieur

Ouvrage du Schoenenbourg (SF_Haguenau). Bloc 5.
Certaines salles de neutralisation de bloc ont une prise d'air en façade (une grille). D'autres (c'est ici le cas) en ont une par champignon blindé situé sur la dalle du bloc.
Sur cette photo, le champignon est bien visible, au premier plan.
Photo Luc_Maillot.


Ouvrage du Sentzich (SF Thionville). Bloc 3.
La plupart du temps, la prise d'air blindée est bien dégagée et donc sensible aux éclats de projectiles ennemis. Mais ici (au premier plan de la photo), elle est protégée par une partie du béton de la TM éclipsée (située au deuxième plan).
Photo Roger_Azambre.


Ouvrage du Galgenberg (SF Thionville). Bloc 6.
Ici, la protection de la prise d'air blindée (au premier plan de la photo) est quasi symbolique : un léger muret de béton !
Photo Vivien_Wiatr.


Ouvrage du Bambesch (SF_Faulquemont). B1.
Tourelle d'armes mixtes (antipersonnel et antichar) éclipsée.
Au premier plan on remarque deux « champignons » de ventilation, partiellement enchassés dans le béton afin d'être protégés des tirs adverses.
Photo Sylvie_Laure_Lambert.


Douilles usagées

Devenir des douilles usagées

Avant de poursuivre cette étude sur la ventilation de bloc, il est indispensable de connaître le devenir des douilles des munitions utilisées.

Les douilles (étuis) des munitions d'infanterie de petit calibre (pour FM, JM, AC25, AC37, AC47, etc.), ne sont pas réutilisables, contrairement à celles des munitions d'artillerie. Les premières sont donc éliminées de la fortification alors que les secondes sont stockées dans une « chambre à douilles » en vue d'une réutilisation ultérieure.


Élimination directe des étuis d'infanterie

Ouvrage du Schoenenbourg (SF Haguenau). B7.
Au-dessous de ce jumelage de mitrailleuses, un ensemble de gaines étanches traverse le béton et conduit les étuis depuis leur sortie de culasse jusqu'à l'extérieur du bloc.
Photo Luc_Maillot.


Ouvrage de la Baisse St_Véran (SFAM). B2.
La gaine d'évacuation du JM débouche sous le créneau de tir.
Photo Jean-Jacques_Moulins.


Élimination indirecte des étuis d'infanterie

Lorsque les armes ne sont pas en façade de bloc, c'est-à-dire lorsqu'elles sont dans des cloches ou des tourelles, leurs étuis usagés sont récupérés dans des caissons étanches, avant élimination manuelle.

Abri CORF du Bichel_Sud (SF_Thionville).
Au pied de cette cloche GFM, par la gaine grise centrale, les étuis usagés tombent dans le caisson étanche qu'un servant ventile (ventilateur à main). Puis ils sont récupérés et éliminés.
La gaine grise de droite permet l'élimination vers l'extérieur de leurs gaz toxiques.
Photo Olivier_Terver.


Cas particulier des FM de défense intérieure, utilisés en de très rares occasions. Ils sont, quant à eux, munis d'un petit sac récupérateur des étuis.
Le sac est vidé le plus vite possible, après utilisation de l'arme.

Ouvrage de Fressinea (SFAM). Entrée.
Ici le FM, muni de son sac, est exposé sur un socle.
Photo Cima.


Récupération des douilles d'artillerie

Les douilles d'artillerie sont toutes récupérées pour être réutilisées.

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Schéma (ébauche encore mais, promis, c'est la dernière ébauche !) de la ventilation d'un bloc de combat.

Les douilles, éjectées de la culasse, viennent frapper un dosseret puis tombent dans un entonnoir qui les conduit sur un toboggan d'où elles glissent jusqu'au local de récupération (chambre à douilles).
Le tout est étanche, pour éviter la pollution du bloc par les résidus toxiques contenus dans les douilles.


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Ouvrage de Sainte-Agnès (SFAM). B2.
Sur cette photo, le dosseret est bien visible, à l'arrière de ce 75/31.
Le dosseret est solidaire du canon. Il le suit donc au cours de ses mouvements de pointage en direction.
Photo Cima.


fourachaux_b2_douilles.jpg

Ouvrage du Four_à_Chaux (SF des Vosges). B2.
Toboggan avec portes étanches installées à différents niveaux, pour le cas ou des douilles viendraient à se coincer au cours de leur descente.
Photo Gérald_Goeltl.


Ventilation des douilles

Ventilation de la chambre à douilles

Lorsque les tirs sont terminés, le ventilateur « air pur » permet de mettre en surpression la « chambre à douilles » car cette dernière et son toboggan sont hermétiquement clos, même au niveau du canon. En effet, au niveau de l'entonnoir, derrière le canon, un clapet anti-retour à balancier se referme automatiquement après chaque passage de douille.

La « chambre à douilles » étant mise en surpression, une simple gaine d'évacuation, sans ventilateur, élimine alors les gaz toxiques (CO), en une quinzaine de minutes.

ge25_sa_douilles.jpg

Ouvrage de Sainte Agnès (SFAM). B2.
Porte étanche de la chambre à douilles.
Sur cette photo on peut voir les deux gaines : arrivée d'air pur (rouge) et départ d'air vicié (jaune) qui permettent de dépolluer les douilles avant leur récupération.
Photo Cima.


Dès lors, on peut enfin réaliser un schéma complet de la ventilation d'un bloc de combat et... clore ce dossier un peu technique !

ge25-001d.png


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Remarque :
Sur la ventilation, nous avons aussi mis en ligne un « dossier n°1 : ventilation d'un casernement souterrain. ».

Compléments...
Commentaires d'Internautes

Commentaires d'Internautes

1-12-2018- Bonsoir Monsieur CIMA
Je viens de prendre connaissance de votre étude sur la ventilation des ouvrages fortifiés et, une fois de plus, je suis très admiratif devant tout le travail de recherches techniques sur ce secteur de zone confinée nécessitant de multiples aspects, techniques à proprement parler, mais aussi sur le souci de la protection humaine à différents moments de la vie des hommes à vivre enfermés, sous terre, au repos ou au combat.
Bravo et merci - Pierre B.
Excellent cela va nous servir amitiés.
Serge A.
Merci Raymond,
Denys C.
Surfons alors... merci à vous !
Laure-Sylvie L.

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E-R Cima, kaff.